mercredi, mai 09, 2007

Etat des Lieux et Avenir du Tourisme à Cannes

Le temps des critiques va bon train actuellement sur la santé de l’économie touristique cannoise et sa capacité à maintenir son développement. En effet, malgré très bon 60ième Festival du Film, on peut entendre ça et là que la capacité de la ville à générer des revenus pour les différents acteurs n’est pas exploitée au mieux, ou alors que les retombées des évènements ne sont pas aussi importantes que celles espérées. Simultanément, les reproches portés à l’égard des congressistes ont atteint leur paroxysme, notamment sur la gêne qu’ils engendrent dans l’encombrement de la ville.

Interpellé par cette situation des moins contradictoire, nous avons souhaité réaliser une étude avec un regard neutre sur les performances de ce secteur qui se trouve au cœur des ressources de la ville[1]. Nous vous proposons ici un aperçu de cette étude.

Les principales conclusions de cette étude démontrent que, globalement, la politique menée par la ville depuis 5 ans est efficace et que le positionnement stratégique adopté par la SEMEC et les professionnels est cohérent même s’il subsiste quelques points d’amélioration.

En effet, les chiffres tendent à montrer que la fréquentation touristique pour la ville de Cannes est en hausse globale de 48% depuis le début de l’année (+16% pour les hôtels et +32% pour les résidences). Sur l'année, et malgré une concentration d'établissements hôteliers hors du commun en France, le taux d'occupation des hôtels est proche des 60% (s’apparentant ainsi à la moyenne nationale). Et, si la fréquentation du mois de février reste relativement faible par rapport à celle des années 2000, notamment marquée à l'époque par la présence durant ce mois du 3GSM, on note qu’elle est en forte augmentation par rapport à l’an dernier (+15%). On remarque ainsi que des activités nouvelles proposées par la ville tel que, par exemple, le « Cannes Shopping Festival » ont un impact positif certain sur l'économie touristique locale du mois de janvier.

Ces premiers chiffres répondent aux critiques d'une baisse de visiteurs et laissent supposer un potentiel de chiffres d'affaires important pour les hôteliers comme pour les commerçants. Pour mieux comprendre l'ampleur de ce résultat, il suffit de le comparer à celui des communes voisines. Par exemple, depuis le début de l'année, la ville de Mandelieu a connu une baisse de fréquentation de 14,5% par rapport à l'an dernier (-3,3% pour les hôtels et -11,2% pour les résidences). Avec des conditions environnementales identiques, cette différence de performance s'explique par la pertinence des orientations stratégiques choisies.

Si l'on regarde de plus près, on note que ces résultats sont la conséquence d'une stratégie adaptée et bien menée.

D'une manière générale, la gestion du portefeuille de salons & congrès de début d'année comme le MIDEM est efficiente et performante. Nous noterons notamment la dynamique vigoureuse du MIPTV. De même, si certains avaient vu dans le départ du 3GSM un échec de la municipalité en place, il est difficile de ne pas souligner la pleine réussite de la gestion de la croissance exponentielle du MIPIM. Etre capable de retenir l’organisation d’un tel congrès et d’en profiter pour créer une dynamique nouvelle autour du même thème souligne la compétence acquise par les instances en place.

Plus spécifiquement, les résultats publiés par le Palais en matières économique, sociale et financière sont remarquables[2]. Ils reflètent la dynamique positive initiée à la suite du choc du 11 septembre 2001. Si ces résultats sont probants, ils sont d'autant plus significatifs qu'ils sont réalisés dans une période de forte mouvance intrinsèque comme extrinsèque pour l'industrie du tourisme[3]. Période qui a notamment vu l’émergence de nouveaux facteurs clés de succès comme l’Internet ou les low cost et durant laquelle la concurrence entre les différentes destinations s’est inexorablement intensifiée. Suite à ces turbulences, seules les places les plus fortes sont susceptibles de s’en sortir. Et s'il est indéniable que Cannes n'est pas la plus grosse, ni la plus riche (notamment face à Barcelone, Dubaï ou Monaco), elle doit pouvoir concourir avec ses propres armes et optimiser l’utilisation de ses ressources.

Evidemment, le plus difficiles pour les acteurs locaux est de transformer l'augmentation du nombre de visiteurs en augmentation du chiffre d'affaires. Si cela est fortement corrélé lorsque l'on regarde l'activité hôtelière, la corréaltion est plus faible avec les commerçants.

Les ressources clés de la ville de Cannes se trouvent dans son expérience et dans son positionnement.

L’expérience et le savoir-faire sont un atout majeur pour Cannes. Si le Palais représente le cœur de l’activité touristique d’affaires, les infrastructures hôtelières, les commerçants et les restaurateurs représentent eux le poumon de cette activité. La compétence de ces acteurs locaux et leur propre expérience de la gestion du tourisme de masse est une source de création de valeur pour la ville. De même, il faut noter que les services d’entretien, de sécurité représentent les artères de ce système. La qualité de l’offre de ces prestataires périphériques n’est plus à faire et la création de valeur finale ne passe que par une performance de chacun de ces organes. Le principal point faible dans ce domaine se trouve au niveau du transport. Malgré les différentes tentatives d’améliorations, celui-ci reste une source de reproches dont le point d’orgue fut atteint pour le congrès des chefs d’Etats Africains et le MIPIM. Néanmoins, la qualité de réalisation des évènements reste une valeur sure de la ville.

La deuxième ressource clé de Cannes se trouve dans l’image et le caractère haut de gamme qu'elle donne à toutes manifestations. Dans ce sens, l'accent mis par les artisans du Palais sur la Qualité notamment par l'instauration du label "Only Cannes" joue un rôle moteur pour les organisateurs d’événements et surtout pour les entreprises internationales participantes. En effet, malgré la situation géographique et la renommée, les différents types de touristes ont toujours comme principale unité de mesure le rapport qualité / prix. Si ce positionnement est globalement maîtrisé, certains acteurs de l’économie cannoise ne sont pas irréprochables. Alors que les tarifs des services ont eu tendance à augmenter la qualité a elle eu plutôt tendance entre 2003 et 2005 à se dégrader. La remarque la plus récurrente que notre étude souligne est le manque d’attention envers le client. A l’heure de la grande messe de la fidélisation du consommateur et du buzz marketing, l’objectif des institutionnels comme des professionnels est de satisfaire le client pour qu’il revienne et aussi pour qu’il parle positivement de la destination. Ce manque d’attention a d’ailleurs contribué à la baisse de consommation quotidienne par personne (-25%). Néanmoins, on note en 2006 un effort réalisé par les professionnels notamment sur le prix. Une des pistes d’amélioration serait de se focaliser sur les ressources humaines afin de stimuler le client. La ville pourrait ainsi sponsoriser (initier) une académie du tourisme de haut de gamme.

Ces 2 types de ressources clés alimentent la nature de l’avantage concurrentiel de Cannes qui se base sur une stratégie de différenciation. Pour que cette différenciation soit un succès, il est nécessaire qu’elle soit significative et par cela qu’elle soit très nettement perceptible par l'acheteur. C’est en essayant de créer une valeur ajoutée et perçue supérieure à celle de ses concurrents que Cannes peut réussir sa différenciation. Celle-ci peut se faire par des éléments tangibles comme la localisation, les évènements voire les activités (le club « Le Palais », le Cinéma de la Plage, etc…) ou par des éléments intangibles comme la marque, la réputation ou l’image. Ce que cherchent les touristes en venant sur la Côte d’Azur et encore plus à Cannes est de trouver quelque chose qu’ils ne trouvent pas ailleurs. Cependant, ce caractère unique de l’offre de Cannes n’est malheureusement plus aussi soutenu que durant la fin des années 90. En effet, les touristes ne sont plus à 100% certains de trouver nécessairement quelque chose d’unique à Cannes (comme cela peut être le cas à Saint Tropez ou Monaco). Si les caractéristiques intrinsèques de Cannes dont notamment sa ressource naturelle sont indéniables, il n’en n’est pas moins vrai des activités proposées. Cannes doit donc continuer sa stratégie de différenciation en se focalisant sur le haut de gamme. Cette stratégie ne sera performante que si, et seulement si, elle s’accompagne d’un label de qualité efficient. Si la Ville n'est pas l'unique acteur et donc pas l'unique responsable, les institutionnels doivent servir de référent et garantir les niveaux de qualité relatif à l’exigence d’une telle stratégie de différenciation par le haut.


[1] Les données sont issues du ministère du tourisme, du CRT, de la CCINCA, de la SEMEC et d’entretiens réalisés depuis janvier 2007 auprès des différents types d’acteurs.
[2] L’impact des activités du Palais sur le Bassin est considérable. Financièrement il représente un impact économique direct de près de 40 millions d’euros. Les dépenses faites par les congressistes auprès des acteurs locaux approchent les 250 millions d’euros, et ceci malgré une baisse sensible des dépenses journalières (-30%). « L’impact économique induit » approche les 500 millions d’euros et contribue largement à la bonne dynamique sociale qui touche le bassin (+2% d’emplois créés en 2006).
[3] L’industrie du tourisme est déstabilisée depuis le début des années 2000. Outre l’instabilité géopolitique et la montée du terrorisme international, on assiste à des risques naturels (tsunami, réchauffement) et sanitaires (fièvre aphteuse) élevés associés à une augmentation sensible des prix du pétrole. Cette modification de l’environnement externe à l’industrie s’accompagne de l’émergence de nouveaux facteurs clés de succès tels que l’Internet, les low costs, l’écotourisme, ou l’exigence accrue des consommateurs.

Le repli des ventes de disques en France.

Alors que la FNAC et que Virigin déverrouillent leur offre de musique sur Internet, le marché français de la vente de disque subit cette année encore une chute de 14%. Cette dernière porte le repli du marché à 40% sur les 5 dernières années.

Hors vente numérique, le marché est aujourd'hui évalué à 800 millions d'euros contre 1.302 en 2002. Le plus inquiétant pour l'industrie est que cette dégringolade n'est pas compensée par le marché du DVD ou du numérique. Si les DVD semblaient être l'avenir de la musique lors du MIDEM 2003, ils ne sont aujourd'hui qu'un complement optionnel au marché du numérique. Ce dernier est quant à lui certes en hausse de 40% sur un an pour atteindre 40 millions d'euros, mais il n'est rien fasse au 128 millions perdus.

Concernant le contenu, le répertoire français constitue une fois encore la majorité de ces ventes avec 60% des ventes de disques en France.

Ce changement constitue un véritable remise en cause des modèles de profitabilité existants dans cette industrie. Les principales sources de revenus commencent à venir des ventes numériques, sur Internet ou sur les mobiles.

Pour le moment, les producteurs essayent désepéremment de faire augmenter les ventes de musique sur Internet. Cela leur permettrait de diminuer drastiquement les coûts de production et de distribution. Néanmoins, ce canal de distribution ne représente que 5% des ventes en France contre 25% aux Etats-Unis et 20% au Royaume Uni. Ceci s'explique aussi par le manque de liberté avec les fichier musicaux achettés sur Internet en France. C'est pourquoi VirginMega et FnacMusic ont décidé de dévérouiller chacun près de 200 000 morceaux afin de facilité l'interopérabilité. Le dernier dénoument dans cette histoire vient d'Apple, qui par l'intermédiaire de son très charismatique patron Steeve Jobs, demande aux majors de fournir leur morceaux sans DRM (acronyme de Digital Rights Management). Dans une lettre intitulée "pensées sur la musique" et publiée sur le site de la compagnie, le patron de la "pomme" propose une reflexion sur un monde sans protection. Il explique qu'il a été obligé de crééer un système de DRM (FairPlay) pour que les quatre majors ouvrent leur catalogue sur iTunes. Cette dernière plateforme représente 50% des ventes en France et vient tout juste de voire arriver sur le marché européen son grand rival nord américain eMusic.

Enfin, reste que la France apparaît que la championne des téléchargements illégaux. Une nouvelle étude sur le téléchargement montre que les internautes téléchargeant illégalement sont toujours les plus nombreux en France. Seuls 15 % des téléchargements seraient légaux.
Pour contreballancer cette tendance de suprémacie des réseaux peer-to-peer, les majors commencent à déplier des stratégies de replies. Par exemple, Universal (qui subit pour le moment la vitalité de Sony BMG entertainment) vient de signer avec la start-up amériacaine SpiralFrog, qui diffusera gratuitement son catalogue d'artistes sur une plate-forme de téléchargement financée par la publicité. D'autres maisons de disques telle qu'EMI semblent s'intéresser de près à ce modèle. Cependant, afin d'être plus efficiente, EMI souhaite se désengager de la production pour se focaliser sur la gestion des droits d'auteurs et donc de la partie édition musicale.